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L'idée insoutenable de te perdre

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L’idée insoutenable de te perdre,
Dans des assemblées stériles où le micro crépite,
Où les démonstrations de force vont jusqu’au bout pointu des chaussures.
Les salles obscures anéantissent les plus belles fleurs,
Ne subsistent que les néons aveuglants et les violettes en plastique.


L’idée insoutenable de te perdre,
Loin des prairies où je bats la terre et le sol qui m’émeuvent.
L’idée insoutenable de te perdre,
Dans une bulle de verre où la mer se jette au loin.
L’espoir fou d’aller vers un ailleurs,
Où tu serais,
Où nous serions,
Sans nous cacher,
Sans faux prétexte.
La vie est un miracle merveilleux qui renouvelle chaque jour l’idée extraordinaire,
De te chérir,
De te garder au coin de mon cœur,
Et de ne plus jamais te perdre.


L’idée insoutenable de te perdre,
Et les fleurs périssent,
Et les arbres gémissent.
Le poids des heures est un fardeau qui courbe les épaules.
Le ciel pleure les rendez-vous manqués,
La joie qui ensemence,
Et le pouls qui resplendit dans le vent chaud.


L’idée insoutenable de te perdre,
Dans les labyrinthes de la raison carnivore,
Dans les chemins tortueux des envies mornes et éteintes,
Dans les bas-fonds des plaisirs immédiats qui dévorent.


L’idée insoutenable de te perdre,
Et nous ne serions plus ensemble,
Tu m’attendrais dans les neiges éternelles,
Dans les branches du chêne,
Au creux d’une grotte cachée des regards.
L’idée m’est insoutenable de te perdre,
La douceur d’une vie simple où le brin d’herbe supplante le Dieu argent.


L’idée insoutenable de te perdre,
Dans une foule compacte qui dévore mon cœur meurtri,
Dans un dédale de magasins où j’épuise la joie à force de plaisirs,
Dans de noirs instincts que recouvre le bleu du ciel,
Dans un regard où aurait disparu l’étincelle.
Et il faudrait la rallumer avec des brasiers incandescents,
Où nous nous baignerions, collés l’un à l’autre, dans la peau de nos origines.
Je m’en souviens,
Et le délice est insoutenable
Tout comme l’idée de te perdre.


Je m’en souviens, ô mon amour,
Le bien aimé de mon âme.
L’idée insoutenable de te perdre,
Dans les tornades de chiffres et de courbes,
Dans l’abîme de pages stériles et de commentaires prolixes,
Dans des discussions acharnées sur la hauteur d’un trait.
La matière est cruelle pour les rêveurs et les amants.


L’idée m’est insoutenable de te perdre,
Au crépuscule de jours tièdes,
Dans l’aurore d’un soleil pâle,
Dans une eau trouble où les crapauds se sont tus,
Entre les lianes d’un bouleau décharné,
Devant un miroir biseauté où mon visage ressemble à tous les autres.

Tu es mien,
Je suis tienne,
Et nous ne serons plus jamais séparés, mon Amour.


L’idée m’est insoutenable de te perdre,
Dans une nuit noire où les loups se sont enfouis,
Derrière des montagnes glacées que désertent les elfes des cabanes,
Sous la terre dure brûlée par les acides de l’avoir,
Recouverte de manteaux chauds et étouffants.


L’idée insoutenable de te perdre,
Toi, mon amour qui soutiens mes nuits
Et enflammes mes désirs recouverts de honte et de vindicte,
Toi qui chasses le démon du tréfonds de mes enfers.


L’idée insoutenable de te perdre,
Quand mes paupières lourdes de sommeil cherchent la lueur de l’aube,
Quand mes mains gelées trouvent la chaleur de ton étreinte,
Quand je claque des dents et que tes brasiers réchauffent mon âme,
Quand je pleure des larmes de sang qui rejoignent les entrailles de la terre.


L’idée insoutenable de te perdre,
Dans une étreinte à la va vite derrière une porte cadenassée,
Dans une maison bien rangée aux tapis soyeux,
Dans un château de verre où règne le silence de la mort.


L’idée m’est insoutenable de te perdre,
Et notre danse sera éternelle.
Le deux sera trois ramené à l’Un.
Ce que nous étions,
Ce que nous sommes,
Je m’en souviens.
Reviens-moi dans le mouvement de la valse,
Trois temps pour notre éternité.


L’idée insoutenable de te perdre.
Je suis ta fiancée du ciel,
Ta compagne du temps sans temps.
Nul ne pourra nous l’enlever, mon amour,
Je t’en fais la promesse.


L’idée insoutenable de te perdre,
Et je disparais dans un souffle,
Et je croule, vaincue par les foudres et la houle.
Nous sommes seuls au monde.
Je suis toi.
Tu es moi.
Ne pars plus, je t’en supplie.


L’idée insoutenable de te perdre.
Une idée des hommes,
Pressés d’avancer, d’arriver.
Reviens-moi loin des contingences et des séparations.
Tu es moi.
Je suis toi.


Anne-Sophie Lacombe
Octobre 2022

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